


"J'aime Dijon comme l'enfant la nourrice dont il a sucé le lait, comme le poète, la jouvencelle qui a initié son coeur"
C'est cette même première route qu'emprunta Victor Hugo le 21 octobre 1839 lors de son voyage en Bourgogne : " On traverse le Val Suzon, charmant et sauvage, et qui rappelle le Jura. A Saint-Seine, joli bourg entre deux collines vertes, il y a une église du quinzième siècle avec abside carrée à rosace, chose rare. Deux lieues plus loin, on traverse un autre village au bas d'une autre vallée. Ce village s'appelle Coursault. Une assez grande maison délabrée, posée en travers au fond du ravin, borde la route. Sous cette maison est percée une chétive arche de pierre qui livre passage à un petit ruisseau. Ce ruisseau, c'est la Seine...." (Choses Vues - Midi de la France et Bourgogne")
Voici le val et le vieux pont de Val-Suzon :
En 1793, la rotonde de l'église, dernière mouture, fut détruite, la crypte comblée par les gravats. Elle ne sera redécouverte qu'en 1843 au hasard de la construction d'une sacristie. Ce qui restait du tombeau de Saint Bénigne ne sera exhumé que le 27 novembre 1858 (reliques dispersées avant ou perdues à la Révolution).
C'est dire que Louis n'a jamais pu connaître cette "crypte ténébreuse"où Scarbo menaçait de le coucher "debout contre la muraille ", pas plus qu'il n'a pu buter contre sa dalle sombre comme l'a pensé Henri Corbat.
L'église, remaniée par deux fois, une première sous la direction de l'abbé Jarenton vers 1100 et, quarante ans plus tard, à la suite du grand incendie qui ravagea Dijon en 1137, fut pourvue en 1147 d'un portail très orné. Le 21 février 1271, la chute du choeur entraîna la destruction de l'édifice à l'exception de la rotonde. L'abbé Hugues d'Arc entreprit la reconstruction complète de l'église à compter du 7 février 1280. Consacrée le 28 avril 1288 et bénie le 27 avril 1300, l'église, devenue cathédrale, est celle que nous voyons actuellement, amputée de la rotonde détruite à compter du 1er mars 1792.
La flèche actuelle -ci-dessus -, élevant sa pointe à quatre vingt treize mètres au-dessus du sol avec cinquante-cinq mètres de pyramide au-dessus de la toiture a été construite en 1894 par Charles Suisse. Elle n'a donc pu être contemplée par Louis qui, en 1815, habitait, avec toute sa famille, 14, Rempart de la Miséricorde.
Voici une vue prise de cette adresse :
"Les "tumultuans" mirent à leur tête un vigneron de haute taille, ancien goujat d'armée, Anthoine Changenet, surnommé le roi Machas. "Il marchait, couronné de lierre et drapé dans un manteau d'étoffe de toutes couleurs, évidemment emprunté au carnaval d'où l'on venait de sortir. Derrière lui, une cinquantaine de gens déterminés brandissaient quelques hallebardes, des pieux, voire même des échalats aiguisés ; quatre tambours grotesquement accoutrés entouraient le guidon consistant en une serviette clouée à une longue perche et que suivait une foule de femmes et d'enfants protégée par une arrière-garde. Tous chantaient le refrain vif et saccadé d'un vaudeville alors en vogue et qui s'appelait "Lanturlu"". Le premier jour, les insurgés assaillirent à coups de pierres, en proférant des menaces de mort, la demeure de Nicolas Gagne, trésorier de France, et de Legrand, président de la Chambre des Comptes. Le lendemain, au nombre de six cents, ils retournèrent chez ces deux officiers, détruisirent leur mobilier, burent le vin de leurs caves, et ayant rencontré le maire et les échevins à la sortie, ils les obligèrent à regagner l'hôtel de ville "plus vite que le pas". (.../...) Ni le maire, Bénigne Euvrard, ni les bourgeois n'avaient su faire leur devoir. Dans l'après-midi seulement, ils se décidèrent à sortir de leurs maisons. La milice des paroisses fit une décharge contre les insurgés, en tua douze, et mit le reste en fuite ; les principaux carrefours furent occupés militairement et, à quatre heures, tout était terminé." Nul doute, me semble-t-il, que cet épisode, burlesque et tragique, a eu la sympathie de Louis.