Dans une notice rédigée pour l’édition Michel Levy -1869 - des œuvres complètes de Charles Baudelaire, Théophile Gautier émet une opinion contestable - me semble-t-il - sur « Gaspard de la Nuit » :
« Dans une courte préface adressée à Arsène Houssaye, qui précède les Petits Poèmes en prose,, Baudelaire raconte comment l’idée d’employer cette forme hybride, flottant entre le vers et la prose, lui est venue. » :
« J’ai une petite confession à vous faire. C’est en feuilletant, pour la vingtième fois au moins, le fameux « Gaspard de la Nuit » d’Aloysius Bertrand ( un livre connu de vous, de moi et de quelques-uns de nos amis, n’a-t-il pas tous les droits d’être appelé fameux ?) que l’idée m’est venue de tenter quelque chose d’analogue…. »
« Il n’est pas besoin de dire que rien ne ressemble moins à "Gaspard de la Nuit" que les "Petits Poèmes en prose" . Baudelaire s’en aperçut dès qu’il eût commencé son travail et il constata cet « accident » dont tout autre que lui s’enorgueillirait peut-être, mais qui ne peut qu’humilier profondément un esprit qui regarde comme le plus grand honneur du poète d’accomplir « juste » ce qu’il a le projet de faire.
On voit que Baudelaire prétendait diriger l’inspiration par la volonté et introduire une sorte de mathématique infaillible dans l’art. Il se blâmait d’avoir produit autre chose que ce qu’il avait résolu de faire, fût-ce, comme au cas présent, une œuvre originale et puissante.
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« Il nous faut nous borner a citer les titres de quelques-uns de ces «Petits Poèmes en prose » , bien supérieurs, selon nous, par l’intensité, la concentration, la profondeur et la grâce, aux fantaisies mignonnes de Gaspard de la Nuit que Baudelaire s’était proposé comme modèle. »
N’y a-t-il pas quelque incohérence à hiérarchiser deux œuvres « singulièrement différentes » (Baudelaire) ?